Institut Européen des Arts Céramiques

Association pour l’enseignement, la formation et la diffusion des arts céramiques en France et à l’étranger

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Estelle Heinrich - 2011

De la bobine au passereau

Installation : trois bobines au sol, une étagère supportant un nuancier de gobelets et un diaporama.

Petite, mon père m'emmenait sur son lieu de travail. Dans l'usine, le mouvement des ouvriers, le bruit des machines et les odeurs de teinture captaient mon attention.
Parfois, j'avais envie de faire des arrêts sur images, prendre le temps, observer, ressentir...
Le temps est passé. Dernièrement, j'ai redécouvert cette usine en friche. Une porte entre-ouverte... mon regard se porte sur un vaste espace vidé de ses machines.
La lumière s'infiltre par les toits vitrés caractéristiques. En enfilade, les ombres régulières sont projetées sur les murs et le sol.

Le silence...

Cette fois, je prends le temps.
De-ci de-là, traînent encore des traces de cet univers textile. Bobines, fils et fiches manuscrites m'interpellent. La mémoire se fraie un passage et m'incite à réagir.
Par un travail photographique d'abord, puis par un jeu avec les éléments, je m'approprie leur existence.
Une autre histoire s'invente...
Je découvre parmi les gravats, des échantillons de fils teints. Plus loin, des documents rendant compte des recettes de ces coloris. Je reconnais l'écriture de mon père.
Je cherche le bleu du ciel, je m'évade au-delà des fenêtres, j'imagine la suite...

Motivée par une énergie créatrice et dans une cadence au travail, je commence à pétrir la terre...

J'ai très envie d'évoquer la bobine. Je vais donc travailler à partir d'une forme conique modelée selon la technique du colombin, accompagnée par une intervention sur le tour. J'aimerais que son aspect extérieur se révèle avec l'idée du palimpseste. A l'intérieur, plutôt un contraste : quelque chose de vif, coloré, vivant, rappelant le savoir-faire de ceux qui ont participé à la réalisation de ces tissus.

Des échantillonnages retrouvés, j'ai souhaité que découle un nuancier qui, toujours en lien avec la forme de la bobine, se décline en une série de gobelets colorés. Sur chacun d'eux est gravé le nom du coloris utilisé à l'époque, comme, par exemple « prèle », « piment », « passereau »...

Plutôt qu'une couleur, ces noms suggèrent une fleur, un animal, un lieu... nous invitant à une promenade imaginaire.

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