2022-2023 - Claire Lindner

Issue d’une famille de céramistes, Claire Lindner s’est d’abord intéressée au graphisme et à la peinture puis s’est essayée à d’autres matériaux comme le verre, le bois ou le papier à travers sa formation à l’École Supérieure des Arts Décoratifs de Strasbourg et au Camberwell Collège of arts de Londres. Elle se destine finalement à la céramique, qui permet selon elle une forme de lâcher-prise.

La céramiste travaille l’argile comme une seconde peau, fixant, dans des sculptures biomorphiques, l’intensité du mouvement et l’instant de la métamorphose. Ni représentatif ni totalement abstrait, son approche formelle convoque un imaginaire organique autour du vivant qui renvoie aussi bien à sa propre vitalité qu’à celle d’une nature plus grande encore. Pour ses sculptures, Claire Lindner travaille d’abord le volume en assemblant des modules faits de boudins d’argile imbriqués. Ces éléments forment une structure cuite une première fois à 950 degrés. Les engobes et émaux sont ensuite pulvérisés au pistolet et les œuvres subissent une deuxième cuisson à 1280°. Ainsi « le jeu des dégradés participe à la perception de mouvement : la couleur n’est pas figée, elle est elle aussi flux, métamorphose».

Repérée dès 2004 avec l’obtention du 1er Prix de la jeune céramique européenne, suivi en 2007 par le Golden Prize for Ceramic as expression de la 4ème biennale mondiale de céramique en Corée du Sud, Claire Lindner est reconnue aujourd’hui comme une valeur montante de la céramique contemporaine. En attestent également ses nombreuses expositions en France, en Europe et à l’international.

Une reconnaissance accrue par sa récente nomination parmi les 30 finalistes internationaux du prestigieux Craft Prize décerné par la fondation Loewe à un artiste pour son accomplissement technique, sa vision artistique et sa maîtrise de la matière. Les œuvres sélectionnées seront présentées à New York au printemps 2023.

Sa résidence à l'Institut Européen des Arts Céramiques 

Pour Claire Lindner, les périodes de résidence sont des moments à part dans sa vie d’artiste qui lui permettent de faire « des pas de côté », de laisser advenir de nouvelles pistes de recherches artistiques.

Touchée par l’approche orientaliste de Théodore Deck, Claire Lindner dresse des parallèles entre ses sources d’inspiration et celles de Deck, où l’ornement reprend de manière récurrente des éléments empruntés à la nature, qu’elle soit végétale ou animale.

Installée au cœur du massif des Corbières, le lien avec la nature est tout aussi fondamental dans le travail de Claire Lindner qui cherche sans cesse à travers ses formes à créer des ponts entre différents mondes organiques, qu’ils soient liés au végétal, à l’animal, au minéral ou à l’humain. De fait, chez Claire Lindner, la nature n’est pas un élément du décor : « elle est le sujet». Ce qui semble prendre tout son sens à une époque où les préoccupations environnementales sont à placer au premier plan.

Si Théodore Deck appréciait la nature et ses formes, il les exprimait par l’ornement, le décor et l’abondance de détails. Il affirmait l’importance de « l’observation directe des produits de la nature, dans ce laboratoire magnifique où il suffit de regarder pour découvrir et puiser sans cesse ».

La céramiste recherche de son côté plutôt l’épure, l’essence du vivant à travers le mouvement, la croissance, qu’elle retranscrit d’abord dans la structure, puis dans la texture et la couleur de ses œuvres. Ainsi, Claire Lindner engage à l’IEAC une relecture dynamique et contemporaine de l’œuvre de Théodore Deck. Elle revisite le concept d’ornement et tente de lui donner vie et forme par le mouvement. 

« Faire déborder l’ornement, le sortir de la forme, l’extraire du décor pour qu’il investisse et colonise l’espace du musée. »