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NINA PROT
RESPIRATION
Quand je suis arrivée à l'IEAC, j'avais déjà la volonté profonde de faire de l'utilitaire. J'aimais le grès, les matières naturelles, et j'avais été très marquée par la découverte du Livre du potier de Bernard Leach quelques années auparavant.
Au fur et à mesure, j'ai découvert la terre vernissée, et un tournage plus libre, dansant, avec des traces de doigts.
« Jean-Nicolas fait des pots comme il fait son jardin. Comme il fait son pain aussi. Il y met les mains, il y met le cœur. Il donne vie. Son jardin n'est pas droit. Il est vivant. Il est beau car il a une âme »Recherche des anses et becs de pichets
Au début j'ai fait des anses tirées classiques. Ce que j'aimais, c'était la trace de ces gestes qui donnait à l'anse du mouvement. La trace du pouce permettait d'affirmer une volonté.Ensuite, j'ai évolué vers des anses plus larges, entre modelage et anses tirées. C'était vraiment un dépassement. J'y amplifie le mouvement et je laisse plus de traces. Ces nouvelles anses me rappellent les nervures d'une branche de chou-fleur. Elles sont marquées de dynamisme et de vie. Elles portent la trace d'une présence, et un lien avec la nature.
Évolution du décor
J'ai commencé par chercher de la gestuelle sur une planche à barbotine, et à m'entraîner sur le papier.J'ai fait quelques essais de décors aux engobes. J'ai voulu les recouvrir d'émaux à la cendre. Ce sont des émaux qui ont leur caractère propre. Ils réagissent tous différemment avec les engobes.
J'aimerais poser un fond « mais tout en laissant assez d'espace pour faire parler mes émaux, leur couleur, et leur texture. C'est un équilibre à trouver. » Ce sont aussi des matières sensibles à l'épaisseur et aux températures de cuisson. Les premiers essais ne sont pas concluants. Il m'aura fallu du temps pour commencer à comprendre les relations entre les émaux et les engobes.
Poésie du quotidien
Je veux faire des pots pour cuisiner, pour que chacun puisse prendre le temps de préparer soi-même sa nourriture avec plaisir. Je veux faire des choses simples. La simplicité est une chose difficile à atteindre.Traces du tournage
Faire des choix et orienter. Continuellement, le tournage est un dialogue intime avec la terre. À tout instant, je suis à l'écoute de la matière. Elle me parle, je lui réponds. Je fais des choix pendant tout le cheminement, qui forment le caractère de l'objet, son identité : renfrogné, élancé, curieux, prétentieux, etc. Et le pot fait son histoire, au fur et à mesure…« Chaque empreinte de mes doigts raconte mon intention d'agir sur la matière dans un mouvement et une direction, à la recherche de spontanéité et de vie. Elles ne sont pas forcément réussies, elles sont humaines.
Ces traces rappellent à qui le prend en main que cet objet a été fait par quelqu'un. Traces d'humanité, ce sont des liens qui nous unissent. »
Le vert, pour moi, c'est la nature. Le pot, ce sont mes mains humaines. Je recherche l'harmonie des deux. Je voudrais que mes pots se sentent bien sur un lit de mousse. »
Aujourd’hui je me retourne devant le chemin parcouru.